Le projet Simandou bloqué par une décision de la junte militaire

Le projet Simandou a connu un énième rebondissement avec la décision de la junte militaire d’arrêter les travaux en cours. Selon une source jointe par WESTAF MINING, la junte aurait exigé d’obtenir une participation gratuite de 15% dans les infrastructures liées à ce mégaprojet… Cette histoire ressemble à s’y méprendre à une autre qui avait éclaté sous le régime de l’ex-président Alpha Condé, en 2011, quand le gouvernement de l’époque tenait à contrôler 51% des infrastructures du Simandou, version Rio Tinto (blocs 3 et 4). Dans son élan nationaliste, l’ex-président guinéen avait décidé, sans en avoir les moyens financiers, de porter la participation de l’Etat à ce niveau irréaliste pour un pays pauvre. Cette exigence, qui a fait traîner les choses pendant près de deux ans, avait à l’époque fait bondir les principaux partenaires étrangers et plusieurs institutions, notamment la Banque Mondiale, le Fonds monétaire international et même quelques puissances occidentales avaient interpelé le président guinéen d’alors sur le sujet. De guerre lasse, Alpha Condé avait finalement abandonné l’idée et ouvert le jeu bien trop tard. La tonne de fer, qui se négociait à environ 189 dollars USD en 2011, a plongé à un niveau tellement bas (environ 40 à 50 USD en 2013) que le discours du président guinéen pour galvaniser les investisseurs était devenu inaudible. La décision d’arrêter tous les travaux en cours sur le terrain – en réalité ceux entamés dans le cadre de l’exploitation des blocs 1 et 2 par le consortium WCS (Winning Consortium Simandou), les blocs 3 et 4 n’ayant pas enregistré d’avancées significatives – fait ressurgir les vieux démons. En effet, selon un expert du domaine minier, la proposition du gouvernement visant à obtenir « gratuitement » 15% du capital d’un ensemble d’infrastructures (chemin de fer et port en eau profonde), prévus en BOT (Build Operate and Transfer) dont le coût est évalué à 14 milliards USD (dont 5 à 6 milliards USD sur fonds propres) équivaudrait à augmenter l’investissement d’environ 2,1 milliards USD, dans la mesure où ce montant doit être disponible pour finaliser les infrastructures. « Le principe du BOT, que ce soit en Guinée ou dans n’importe quel pays, est de laisser l’investisseur privé prendre tous les risques, exploiter l’infrastructure durant la période convenue (33 ans dans le cas du Simandou) et ramener au finish le(s) ouvrage(s) dans le portefeuille de l’Etat au terme du délai convenu. Vouloir changer cela va bouleverser toutes les prévisions », a expliqué à WESTAF MINING cette source. « Si WCS accepte de donner 15% à l’Etat, elle devra répercuter ce surcoût sur le prix de vente de la tonne de fer extraite. Cela va réduire la marge de profitabilité du projet. Ce n’est pas réaliste », a dit cet expert. Une autre source bien connue dans le milieu du secteur minier a dit à WESTAF MINING qu’il est à craindre que les lobbies hostiles au développement du Simandou Nord n’aient été activés pour bloquer le projet. « En général, lorsqu’une nouvelle administration est installée, surtout en Afrique, les investisseurs sont conscients que la plupart des nouveaux responsables n’ont pas l’expérience nécessaire pour déjouer les pièges subtils. Ainsi, ils n’hésitent pas à s’engouffrer dans les failles tant que cela va dans le sens de leurs intérêts », a dit cette source. Outre le fait que la Guinée pourrait perdre l’opportunité que présente un marché cyclique comme celui du fer (avec des cours qui flirtaient avec les 200 USD en 2021 avec la période Covid-19), certains experts estiment que c’est un tournant historique qui risque d’être raté. « Le minerai du Simandou permet de faire du Green Steal (« acier vert »), moins polluant et cela est important dans le cadre de la lutte contre la pollution. C’est un point non négligeable », a indiqué notre source du secteur minier. Selon elle, il est plus pragmatique d’abandonner les prétentions irréalistes pour favoriser l’implantation de ces infrastructures stratégiques en territoire guinéen. « Croire qu’il y a un autre choix est non seulement naïf, mais il est clair qu’une telle opportunité ne se présentera pas aussitôt, si on rate ce virage. Toutes les revendications qu’on veut soulever aujourd’hui peuvent parfaitement être mises en veilleuse et soulevées si nécessaire, mais après que toutes les infrastructures soient déjà réalisées et que l’exploitation a commencé », a conseillé notre source. La réserve du Simandou est divisée en deux parties : le Simandou nord (blocs 1 et 2) est contrôlé par le consortium SMB-Winning (WCS) et la partie sud (blocs 3 et4) est sous concession attribuée au géant Rio Tinto. Westaf Mining .................................................................................................................................

WESTAF MINING édition numéro 89 du 15 Novembre 2024

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