Simandou face à la chute des prix de l’acier : enjeux et défis pour le mégaprojet guinéen

La baisse des prix de l’acier sur le marché international constitue un facteur déterminant pour l’évolution du mégaprojet Simandou en Guinée, l’un des plus vastes gisements de fer inexploités au monde, avec des réserves estimées à 2,4 milliards de tonnes d’un minerai d’une teneur exceptionnelle en fer, d’environ 67 %. Ce projet, piloté par une coentreprise réunissant Winning Consortium Simandou (WCS), Rio Tinto-Simfer et l’État guinéen, se trouve au cœur d’une bataille pour le contrôle de la production d’acier (le fer étant un élément essentiel à sa fabrication). Parmi les actionnaires de WCS figure Baowu Steel, le plus grand producteur d’acier au monde, avec une production annuelle dépassant les 130 millions de tonnes. La contraction des prix de l’acier, tombés sous la barre des 700 dollars la tonne en 2024 contre plus de 1 300 dollars en 2021, affecte directement la rentabilité de l’exploitation en réduisant la demande en minerai de fer et en mettant sous pression les coûts d’investissement et d’exploitation. Dans un contexte de ralentissement économique global, notamment en Chine, qui représente 54 % de la demande mondiale d’acier, les perspectives de rentabilité du projet restent liées à la détermination des partenaires à le mener à bien. La consommation chinoise d’acier est en recul, passant de 995 millions de tonnes en 2021 à environ 940 millions de tonnes en 2023, ce qui limite les débouchés pour les producteurs de fer. Cependant, la qualité du minerai de fer guinéen, favorisant la production de « green steel », permet aux industriels de réaliser d’importantes économies d’énergie. L’implication de Baowu Steel en tant qu’actionnaire de WCS pourrait offrir un avantage stratégique. Son intégration dans le projet lui permet de sécuriser une partie de son approvisionnement en minerai de haute qualité, réduisant ainsi l’impact des fluctuations du marché sur la viabilité économique du projet. Les entreprises impliquées dans Simandou doivent aussi composer avec l’augmentation des coûts de production, estimés entre 40 et 50 dollars par tonne de minerai extrait. Avec les prix actuels du minerai de fer oscillant autour de 110 dollars la tonne, contre plus de 200 dollars en 2021, la marge bénéficiaire des producteurs se réduit considérablement. Une baisse prolongée pourrait dissuader les investissements nécessaires à la finalisation du projet, notamment la construction du port en eau profonde et des infrastructures ferroviaires, dont le coût est estimé à 8 milliards de dollars. Toutefois, la participation de Baowu au sein de WCS garantit un soutien financier et stratégique, réduisant les risques de ralentissement des investissements. D’un autre côté, la chute des prix de l’acier peut amener les acteurs du projet à négocier des contrats d’approvisionnement à long terme plus avantageux avec les aciéries, en anticipant une remontée des prix. L’un des scénarios envisagés serait une exploitation progressive du gisement, avec une production initiale d’environ 60 millions de tonnes par an, ajustable selon l’évolution du marché. Une telle stratégie permettrait d’atténuer les effets de la volatilité des prix et d’optimiser la rentabilité du projet sur le long terme. L’État guinéen, qui compte sur Simandou pour générer des recettes fiscales estimées à 1,5 milliard de dollars par an une fois le projet pleinement opérationnel, pourrait voir ses revenus impactés si les prix restent bas. L’accord signé avec les exploitants prévoit des redevances minières d’environ 3,5 % sur la valeur du minerai exporté, mais une baisse des cours pourrait réduire ces gains. En réponse, le gouvernement pourrait exiger une accélération de la transformation locale du minerai, avec la construction d’unités de production d’acier pour capter une plus grande part de la valeur ajoutée. L’influence de Baowu sera déterminante dans ce processus, l’entreprise ayant l’expertise et les ressources nécessaires pour envisager une intégration industrielle en Guinée. ----------------------------------------------------------------------------------------------------------------- NB : La compagnie WCS a débuté, dès janvier 2021, soit neuf mois avant le coup d’État militaire, la réalisation de plusieurs ouvrages en Build-Operate-Transfer (BOT). Parmi ceux-ci figurent le tracé du chemin de fer, des travaux de creusement de tunnels et le début de l’aménagement du port de Moribayah (Forecariah). Cette démarche était conforme à sa convention de base sur l’aménagement des infrastructures. Plus tard, en mars et en juillet 2022, la junte militaire a arrêté les travaux afin d’imposer 15 % d’actions gratuites de l’État dans la société d’infrastructures ainsi qu’un « co-développement » des ouvrages d’évacuation du minerai de fer. Cet arrêt soudain a permis à l’autre partenaire du projet Simandou, Rio Tinto/Simfer , qui n’avait pas encore commencé la construction de grandes infrastructures, de revenir dans le jeu. Westaf Mining ----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Copyright © Westaf Mining - Contenu protégé. Toute reproduction partielle ou intégrale, sans l'accord préalable et écrit de Westaf Mining , est strictement interdite.

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