« Simandou Vision 2040 », une stratégie qui oppose la junte militaire guinéennes à ses adversaires

En Guinée, sous l’ex président Alpha Condé, la communication officielle indiquait que le mégaprojet Simandou (1) devait au moins doubler le taux de croissance du pays, en passant à deux chiffres. Sous la junte militaire du général Mamadi Doumbouya, le discours reste maintenu, même si certaines bases ont changé avec la création de la Compagnie du Transguinéen (CTG). La CTG a été montée comme une sorte de joint-venture chargée de gérer les infrastructures (chemin de fer d’environ 650 km et port) avec un actionnariat remanié : 42,5% pour chacun des deux partenaires étrangers (WCS et Rio Tinto Simfer qui ont acté le principe du « co-développement »), et 15% pour l’Etat. Là où le régime déchu comptait sur un modèle Build Operate and Transfer (BOT) pour une exécution rapide de ces infrastructures indispensables à l’acheminement du minerai de fer être de la montagne du Sud-Est (en fait le véritable problème de ce gisement de fer de classe mondiale), le pouvoir militaire a commencé par tâtonner, avant de trouver finalement une voie qui semble avoir relancé l’espoir. Si le schéma initial avait été suivi, avec la vitesse d’exécution des travaux par Winning Consortium Simandou (WCS) (2) – loin de l’autre opérateur Rio Tinto Simfer, qui avait à l’époque mis son activité en veilleuse -, nul doute qu’à la fin de cette année 2024, les premières tonnes de fer seraient déjà exportées via le port en eau profonde de Moribayah (Forécariah), à environ 100 km de la capitale Conakry. Ce schéma avait l’avantage de prévoir des aménagements connexes au chemin de fer (multi-usage et multi-usagers, contrairement à ce qui a été dit après le pustch de septembre 2021) et comptait également sur le modèle d’infrastructure portuaire implanté du côté de Forecariah pour doper à la fois les exportations minières dans cette gigantesque plateforme pouvant également servir à d’autres fins, surtout au milieu et à la fin de l’exploitation. « Les arrêts répétés constatés dans le projet Simandou ont surtout occasionné une perte de temps. Au finish, le projet a été réorienté et aujourd’hui l’opérateur principal sur lequel tout le monde compte pour finaliser toutes les infrastructures est le géant mondial Baowu Steel, qui est entré dans le capital de WCS », explique une source qui a travaillé sur le dossier depuis le début. « Les avantages pour l’Etat d’entrer dans le capital de la société d’infrastructures qu’on a fait miroiter au début sont très relatifs. Pour un investissement aussi colossal (plus de 15 milliards USD), il est très aléatoire d’espérer des dividendes, même à moyen terme. A la limite, cette position permet de siéger au Conseil d’administration de la CTG et donc de savoir ce qui s’y passe », poursuit cette source. « En fait, c’est surtout au niveau de l’activité générée par l’aménagement des différentes infrastructures que la Guinée devait se préparer en misant sur le professionnalisme et la formation des entreprises locales et de leurs employés. C’est comme ça, aussi bien au moment de la phase de construction que de l’exploitation, que le contenu local aurait eu tout son sens », estime cet expert. Une autre source proche des milieux miniers dit s’inquiéter de voir les entreprises guinéennes dépassées par le niveau d’expertise et d’exigence requis dans un secteur minier de plus en plus compétitif. « Je sais que l’ancien régime avait dans son plan l’envoi d’une masse d’étudiants, techniciens et ingénieurs pour maîtriser progressivement toute le chaîne de valeur. Aujourd’hui, on parle de la « Vision 2040 », mais il faudrait être beaucoup plus concret en anticipant sur cette question », conseille cette source. Selon elle, il ne sert à rien d’avoir des ambitions si les services que pourraient garantir les ressources humaines locales se trouvent très en deçà des normes exigées par les entreprises multinationales qui détiennent des concessions minières sur le gisement de fer. « Evidemment, cela requiert une vraie stratégie et une planification rigoureuse en mettant en avant les meilleurs étudiants guinéens et surtout les meilleures entreprises locales capables de fournir ce genre de service de qualité. Cela est d’autant plus pertinent que rien ne dit que la junte militaire sera toujours là en 2040 », conclut cette source. ----------------------------------------------------------------------------------------------------------------- (1) Le gisement du Simandou est constitué de 4 blocs. Les Blocs 1 et 2 sont contrôlés par Winning Consortium Simandou (WCS) depuis novembre 2019 suite à un appel d’offres international. WCS a vu ces derniers mois le géant mondial Baowu Steel entrer dans son capital. Les Blocs 3 et 4 sont sous le contrôle de Rio Tinto/Simfer. Cette compagnie a obtenu ses premiers permis de recherche en 1997, via la junior RTZ Mining. (2) WCS a remporté l’appel d’offres devant le géant Fortescue Westaf Mining ----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Copyright © Westaf Mining - Contenu protégé. Toute reproduction partielle ou intégrale, sans l'accord préalable et écrit de Westaf Mining , est strictement interdite.

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